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CANONS ROMPUS N°3

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VERSION A4 (lecture informatique)

AU SOMMAIRE

Édito  https://canonsrompus.wordpress.com/2018/01/22/editorial-du-n3/

Raqqa, Mossoul, la libération par les ruines  https://canonsrompus.wordpress.com/2018/01/22/raqqa-mossoul-la-liberation-par-les-ruines/

Fin de l’état d’urgence, vive l’état d’urgence !  https://canonsrompus.wordpress.com/2018/01/22/fin-de-letat-durgence-vive-letat-durgence/

Le G5 Sahel : des supplétifs pour une armée d’occupation  https://canonsrompus.wordpress.com/2018/01/22/le-g5-sahel-des-suppletifs-pour-une-armee-doccupation/

La guerre de Corée (1950-1953)  https://canonsrompus.wordpress.com/2018/01/22/la-guerre-de-coree-1950-1953/

Femmes contre la guerre 1914-1918  https://canonsrompus.wordpress.com/2018/01/22/femmes-contre-la-guerre-1914-1918/

FEMMES CONTRE LA GUERRE 1914-1918

Les deux numéros précédents de Canons Rompus incluaient un article historique sur les oppositions radicales à la guerre 14-18 qui déclenchèrent – entre autres facteurs – une vague révolutionnaire sans précédent sur le continent, à commencer évidemment par la constitution des soviets en Russie. Cet article revient sur le rôle des féministes françaises pendant la guerre, ralliées elles aussi dans leur immense majorité à l’Union sacrée mais dont un petit noyau va réussir à maintenir le combat à la fois contre la guerre, l’exploitation capitaliste et l’oppression des femmes. Continuer à lire … « FEMMES CONTRE LA GUERRE 1914-1918 »

LA GUERRE DE CORÉE (1950-1953)

Depuis l’été, il est de nouveau question de la « montée des tensions » entre la Corée du Nord et les USA, les menaces de guerre succédant aux essais de missiles nucléaires, et les déclarations fracassantes succédant aux commentaires journalistiques qui, au fond, n’expliquent rien du tout. Nous voilà une fois de plus face à une situation où on ne comprend rien. Et, quand on ne comprend rien, ça vaut toujours le coup de faire un petit détour par l’histoire. Nous vous proposons donc un petit retour historique sur la guerre de Corée, ses origines, son déroulement, ses conséquences jusqu’à aujourd’hui. Continuer à lire … « LA GUERRE DE CORÉE (1950-1953) »

LE G5 SAHEL : DES SUPPLÉTIFS POUR UNE ARMÉE D’OCCUPATION

Il y a 5 ans, en janvier 2012, le président Hollande déclenchait l’opération Serval (« le plus beau jour de ma vie politique », osera-t il commenter) : la France envoyait ses Rafale et débarquait ses troupes au Mali pour « stabiliser le régime » et « repousser les djihadistes ». Les militaires de Serval ont ensuite été intégrés à l’opération Barkhane, qui compte à présent environ 4 200 soldats. Prétextant que cette force d’occupation coûtait trop cher (800 millions par an environ), le président Macron, tout juste élu, a initié la « Force Conjointe – G5 Sahel », qui, au fait, ne remplace nullement Barkhane. Il s’agirait d’une force composée uniquement de soldats « locaux » de cinq pays (Mauritanie, Mali, Burkina-Faso, Niger et Tchad). Que ce soit, comme le titrait Le Figaro le 3 juillet 2017, « Macron [qui] lance une force militaire africaine contre les djihadistes » ne constitue sans doute pas une contradiction. Destinée à lutter contre les « djihadistes » donc, mais aussi les « trafics » (de drogue, d’armes), et, bien entendu, à contrôler les « flux migratoires », cette force conjointe ambitionne de compter 5 000 soldats voire 10 000 à terme. Problème : il n’y a pas d’argent ; qu’à cela ne tienne, le président Macron a rassemblé en décembre une grande réunion internationale pour lever des fonds. Si la France se contente pingrement de 8 millions d’euros, chacun des pays du G5S doit payer 10 millions, et l’UE accepte de donner 50 millions. Mais les généreux donateurs sont… les Émirats Arabes Unis (30 millions) et surtout l’Arabie Saoudite (100 millions). On en tirera les conclusions qu’on voudra sur les objectifs certainement démocratiques de l’opération. Non mandatée par l’ONU (qui s’est contentée d’en « saluer le déploiement »), la Force Conjointe peine cependant à se mettre en place, et à voler de ses propres ailes, puisque la seule opération guerrière, pour le moment, a été « soutenue » par 200 militaires français. Fin 2017, il y avait officiellement en ordre de marche 5 bataillons (un par pays) de 750 soldats, qui s’ajoutent donc aux Français de Barkhane, qui sont loin d’avoir plié bagage. Bref, cinq ans après, c’est la continuation de Serval, avec des moyens en moins : une logique coloniale qui s’appuie, pour ses opérations de police, sur ce qu’on appelait naguère des « forces supplétives ».

les communistent tombent et les devises montent grosz

FIN DE L’ÉTAT D’URGENCE, VIVE L’ÉTAT D’URGENCE !

Après six prolongations consécutives de l’état d’urgence, la loi du 30 octobre 2017 a été promulguée sans bruit ni fracas pour transposer dans le droit commun ce que deux ans de régime d’exception ont su normaliser dans les esprits. Une chose est sûre, les mesures de l’état d’urgence n’ont nullement rasséréné la population mais bien ancré le climat de peur et de durcissement sécuritaire, étendu la répression des prolétaires d’ici et venus d’ailleurs et enfin déployé l’autoritarisme insatiable d’un État belliqueux. Continuer à lire … « FIN DE L’ÉTAT D’URGENCE, VIVE L’ÉTAT D’URGENCE ! »

RAQQA, MOSSOUL : LA LIBÉRATION PAR LES RUINES

Ça y est, entend-on, Raqqa et Mossoul sont « libérées » ! Les peuples syrien et irakien, animés d’une juste colère et guidés par la main bienveillante des Américains, se sont enfin débarrassés de l’infâme joug de l’État islamique : « Daech ».
Si l’on peut certes se réjouir de la chute de l’État islamique, régime autocratique et passablement sanguinaire, il convient cependant peut-être de modérer sa joie… Continuer à lire … « RAQQA, MOSSOUL : LA LIBÉRATION PAR LES RUINES »

Éditorial du n°3

Le nouveau président Macron a passé Noël avec des soldats français au Niger, s’empiffrant de volaille et dégustant « très ému » un gâteau au glaçage bleu-blanc-rouge ; la ministre des Armées Parly a, elle, fêté la Saint-Sylvestre parmi les troupes de Barkhane au Mali (on ignore le menu). Toute l’année, dans la continuation de l’équipe Hollande – Le Drian, ils ont écumé le monde pour vendre des armes, en particulier des avions, aux plus grandes démocraties : Qatar, Égypte, Inde, Arabie Saoudite… La France est ainsi le quatrième vendeur d’armes au monde. Mais si l’on compte Airbus (considéré comme « transeuropéen » par le Stockholm International Peace Research Institute) elle passe sans doute au deuxième rang. Et toute l’économie française s’en porte bien, merci ! Nos braves marchands de canons gaulois n’ont plus qu’une crainte : que les multiples guerres auxquelles l’armée française participe, véritables publicités pour les Rafale et autres canons Caesar, ne s’achèvent. Or, a rassuré la ministre début janvier, si « la victoire sur Daech » est proche en Syrie et en Irak (voir page 2), elle ne mettra pas fin à l’intervention de la France (on trouvera bien quelqu’un à bombarder). Quant au Mali, loin d’annoncer le retrait de la force Barkhane, le gouvernement s’évertue à la compléter, pour ses basses œuvres, d’une force « autochtone », le G5 Sahel, en plus des 10 000 soldats de l’ONU (voir page 9). À l’intérieur, désireux de mettre fin à un état d’exception qui se prolongeait peut-être un peu trop pour être crédible, il a mis fin à l’état d’urgence… en intégrant l’essentiel de son contenu dans la loi (voir page 6). L’état de guerre, à l’extérieur comme à l’intérieur de nos frontières, est donc l’état normal.

Dans ce monde à feu et à sang, on s’apprête à célébrer le centenaire de la fin de la guerre 14-18, en passant sous silence les trouble-fêtes qui, en pleine « union sacrée », osaient défier l’unanimisme grossier de la bourgeoisie poussant devant soi le prolétariat pour qu’il s’entre-déchire. On étudiera dans ce numéro l’apport spécifique des féministes françaises (voir page 14). Et, puisqu’on nous menace encore et toujours de l’apocalypse nucléaire, que déclencherait, au choix, le dictateur fou de la Corée du Nord ou le président démocratiquement élu fou des États-Unis, nous voulons essayer de comprendre d’où vient la situation catastrophique de la Corée : nous vous proposons donc un article sur la guerre de Corée (1950-1953), la première guerre de l’après-Hiroshima (voir page 10).

Bonne lecture !

L’équipe de rédaction rappelle qu’elle a hâte de lire les contributions que vous pouvez envoyer à notre adresse mail : acanonsrompus@riseup.net.

La guerre entre le Tigre et l’Euphrate

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Mossoul : destruction et victimes civiles
Lorsque l’on entend parler de la bataille de Mossoul, dans la presse ou à la radio, c’est en général pour évoquer la chute « imminente » de la ville, ou alors pour montrer que « la vie reprend ses droits dans la ville libérée ». Pourtant, la guerre y fait toujours rage, et à l’ordre sans doute terrible qui régnait sous le joug de l’État islamique ont succédé les horreurs de la guerre moderne.
La ville est traversée du nord-ouest au sud-est par le fleuve Tigre. De novembre à janvier, une « coalition » hétéroclite a laborieusement conquis tous les quartiers est. Cette coalition était grossièrement structurée autour de deux pôles : d’une part, les armées irakienne et américaine, et d’autre part les peshmergas du GRK (1) et leurs alliés turcs. Le 16 novembre, Massoud Barzani, le président du GRK, a annoncé que ses forces stoppaient leur progression au niveau des faubourgs nord de Mossoul, mais qu’elles « ne se retireraient pas des territoires conquis ». Cette annexion a suscité la colère du gouvernement « légitime » irakien de Haider Al-Abadi, sans autre conséquence pour le moment. Continuer à lire … « La guerre entre le Tigre et l’Euphrate »

1917 : une révolution contre la guerre

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la manifestation du 23 février 1917

Il y a un siècle exactement, en mars 1917, débutait la révolution russe.
Cette révolution, menée avant tout par les paysans, ouvriers et soldats, a déclenché une vague révolutionnaire à l’échelle du monde entier, et entretenu les espoirs du prolétariat pour des décennies…
Nous voulons insister sur le rôle joué par la guerre dans l’aggravation insupportable des conditions de vie et la montée de la colère en Russie ; sur celui joué par les soldats dans le déclenchement et la poursuite de la révolution ; et sur l’importance de la question de la paix, dès les premières manifestations de rue.


Une guerre de plus en plus insupportable

Dans le premier numéro de Canons Rompus, nous avons vu que le déclenchement de la première guerre mondiale, à l’été 1914, suscite fort peu d’opposition, à l’exception de quelques « socialistes » de gauche, que bientôt on allait appeler « communistes ». Dans la Russie tsariste cependant, au contraire du Parti Socialiste-Révolutionnaire (S.-R.), le Parti Ouvrier Social-Démocrate de Russie (P.O.S.-D.R), malgré sa division depuis 1903 entre bolcheviks et mencheviks, adopte une position unanime et rejette la guerre.
Celle-ci éclate néanmoins, et ses débuts voient la Russie, qui a mobilisé 14 millions de soldats, connaître quelques succès, l’essentiel des forces allemandes se concentrant sur le front ouest. Mais très vite les défaites s’accumulent, l’armée allemande occupe la Pologne et la Lituanie dès 1915. On estime les pertes russes, sur l’ensemble de la guerre, à environ 1 800 000 morts et plus de 5 millions de blessés (sans compter les pertes civiles, difficiles à calculer mais qui sont estimées à 1 500 000). Continuer à lire … « 1917 : une révolution contre la guerre »

Les CAO : mise à l’écart, mensonges et contrainte

arton2077À cause de la guerre, ou du fait de la violence des rapports sociaux imposés par le système capitaliste mondialisé, des dizaines de milliers de personnes prennent chaque année la route de l’exil. Si elles ne meurent pas en mer ou aux frontières, elles parviennent jusqu’à l’Europe des camps, qui se décline à travers tout un tas de dispositifs, savant mélange de coercition et d’humanitaire. En voici un petit exemple avec la gestion des exilé.e.s de Calais.


En octobre 2016, alors que l’immense campement de Calais est expulsé sous couvert d’opération humanitaire, on entend parler d’un nouveau type de centre d’hébergement : les CAO, centre d’accueil et d’orientation. Leur fonction semble évidente : faire disparaître les exilé.e.s vivant sur le campement en les disséminant dans toute la France, de préférence à la campagne, et surtout loin de Calais.

La mise en place des CAO

La mise à l’écart des personnes exilées qui tentent de franchir la frontière avec l’Angleterre en passant par Calais avait en fait commencé avec la « jungle » elle-même. En 2015 la mairie de Calais décide de pousser ceux qu’elle appelle « les migrants » à l’extérieur du centre ville : elle vide les squats, leur interdit de fait l’accès aux équipements publics (piscine, bibliothèque) en exigeant pour y entrer des justificatifs d’identité et de domicile. En avril, les exilé.e.s sont finalement regroupé.e.s dans un seul lieu, à l’écart de la ville, de l’autre côté de la rocade. Continuer à lire … « Les CAO : mise à l’écart, mensonges et contrainte »